Dans une ambiance sympathique nous avons pu écouter avec intérêt le responsable étudiant de l’AF de Nantes nous entretenir sur le libéralisme. Ceci nous a permis d’en débattre, nous y reviendrons…
Le cercle a été suivi par les courageux par un collage dans les rues de Nantes !

« Loin que l’idée d’autorité contredise l’idée de liberté, elle en est au contraire, l’achèvement et le complément. » Charles Maurras, Mes idées politiques (p. 123).
« La liberté économique c’est la liberté pour le commerçant et pour le riche de s’enrichir indéfiniment et pour le pauvre de mourir de faim s’il ne peut pas faire autrement. » Lamartine
« La déclaration des droits de l’homme, le libéralisme de 89, 1830, 1848 n’a profité qu’aux étrangers. Qu’importe aux étrangers le despotisme gouvernemental ? Ils ne sont pas du pays ; ils n’y entrent que pour l’exploiter… ». Proudhon
Le libéralisme trouvant sa source dans les ouvrages de nombreux auteurs il est difficile de le définir. Il est important de partir de l’origine du libéralisme qui est avant tout philosophique.
Origines
- Philosophiquement le libéralisme naît avec le nominalisme qui lui même apparaît durant la seconde scolastique espagnole et est l’œuvre de Guillaume d’Ockam (XIIIème siècle moine franciscain d’Oxford). Selon lui, il n’y a pas d’existence réelle de ce qui va au-delà de l’individu, pas d’être réel au-delà de l’être singulier. C’est la naissance d’une pensée de l’individualisme qui est l’inverse de l’holisme (un tout peut avoir des propriétés en tant que tout et n’est pas juste l’addition de ses composantes singulières).
Libéralisme philosophique : Le libéralisme est basé sur un postulat anthropologique erroné. Contrairement à ce qu’a montré Aristote, les libéraux partent du principe que l’homme n’est pas un animal social par nature. La société lui serait étrangère. Pour eux, l’individu préexiste aux corps et groupes sociaux et se considère comme l’unique source des valeurs qu’il s’est choisies. Il n’y a plus de conception objective de la réalité. On bascule dans la métaphysique de la subjectivité. La société ne serait alors que la stricte somme des parties qui la compose, contrairement à la vision holiste selon laquelle le tout est supérieur à la somme des parties.
- L’individualisme explose au XVIIIème siècle dans le contexte des Lumières, de l’idéologie du progrès et de l’ascension de la bourgeoisie voulant s ‘émanciper des contraintes de l’ancien régime féodal (de la société d’ancien régime). Les bourgeois veulent du pouvoir proportionnellement à leurs richesses. Le statut social de la bourgeoisie ne leur permet pas d’exercer le pouvoir puisqu’ils sont relégués derrière la noblesse. Ils vont donc s’opposer aux valeurs aristocratiques et aux valeurs populaires et traditionnelles pour exister.
- Montée de l’économie face à la politique avec la révolution industrielle.
Libéralisme économique : L’individualisme régnant en maître, l’intérêt de l’individu doit être constamment maximisé. L’homme n’est pas un animal social, mais un homo œconomicus. L’individu ne rentrerait ainsi en société que s’il y trouve un intérêt. D’après Hobbes, son intérêt est d’échapper à la guerre de tous contre tous. Pour Locke, cet intérêt se caractérise par la défense de la propriété privée (philosophes anglais précurseur du libéralisme et du contrat social). Les individus vont donc se départir d’un peu de leurs prérogatives pour former entre eux un contrat social (celui de Rousseau, par exemple). La société n’est donc pour les libéraux qu’un moyen de défendre ses propres intérêts, et non de concourir ensemble au bien commun. Le libéralisme est donc une conception dévoyée de la liberté. Pour les Anciens (ou Classiques), la liberté se conçoit comme la possibilité de faire, c’est-à-dire de participer à la vie publique. Pour les Modernes, l’individu est libre de faire ou de ne pas faire, en fonction de son intérêt. Ainsi, il peut se désolidariser à tout moment du groupe, s’il n’y trouve pas son compte. La liberté pour participer à la poursuite du bien commun disparaît au profit du gouvernement autonome.
Libéralisme politique (La politique pour Maurras c’est faire coïncider passion et devoir, intérêt privé et intérêt national, c’est l’art de faire prospérer les communautés, la maîtresse en politique c’est l’expérience) : Les libéraux ont désigné l’État comme un ennemi. Dans la vision Classique de la société, la fonction marchande est subordonnée à la modalité souveraine, puis guerrière. Aujourd’hui, l’économie occupe la première place. L’État a été dépouillé et a été prié de s’effacer derrière un marché souverain. L’économiste Polanyi a montré que « la société est gérée en tant qu’auxiliaire de l’économie. ». (TAFTA, rachat entrainant des licenciements…).
“Politique d’abord”, Charles Maurras
En politique, il devrait toujours y a voir un choix, à savoir faire primer le bien commun sur l’intérêt de quelques individus. Mais pour le libéral, il n’y a que des problèmes techniques à résoudre. L’administration des hommes est devenue l’organisation des choses. Les rapports sociaux ont été réifiés. Le privé est toujours privilégié par rapport au public.
L’État protecteur et garant du bien commun a été détruit pour ne devenir plus qu’un État intendant. Il n’existe plus que pour garantir les conditions nécessaires au libre marché (collecter les impôts, assurer la sécurité des libertés). En aucun cas il ne doit imposer un modèle, encore moins une conception du bien commun, il ne fait plus que de la gouvernance. Sa neutralité a priori objective est à l’origine du pluralisme politique. L’État respectant la liberté d’autrui, chacun estimant avoir la vérité peut exprimer sa vision de la réalité. Cette conception libérale conduit à la religion des Droits de l’Homme, érigés aujourd’hui en principe universel. L’État est donc devenu le meilleur ami du libéralisme. Le combat des premiers libéraux aura été de limiter les prérogatives de l’État. Aujourd’hui, ils se battent pour défendre le libéralisme d’État.
- Mai 68 : l’aboutissement du rêve bourgeois avec le libéralisme sociétal/social.
Le libéralisme ayant détruit la notion de bien commun, chacun peut donner libre cours à sa liberté dans la mesure où elle n’empiète pas sur celle d’autrui. Rien ne peut donc légitimement empêcher les individus de satisfaire leur moindre désir. Le slogan de mai 68 prend ici sa pleine mesure aujourd’hui. Il faut jouir sans entrave ! Un enfant quand je veux (contraception, avortement), comme je veux (insémination artificielle, dite PMA), avec qui je veux (mariage homosexuel). L’homo oeconomicus a tout réifié, tout marchandisé. Charles Péguy l’avait déjà constaté : « Tout l’avilissement du monde moderne consiste au fait d’avoir rendu négociable ce qui ne l’était pas avant.» Le poète parlait en son temps de l’art, de la culture ou du travail, mais il n’avait certainement pas prévu le retour de la marchandisation humaine, la fabrique en Inde des bébés conçus par mères porteuses pour satisfaire le désir d’adultes réduits à de simples consommateurs.
Conclusion
Le libéralisme se dévoile ainsi pleinement. Les libéraux (Macron) et les libertaires (Belkacem) ne sont finalement que les deux faces d’une même pièce.
Le libéralisme démocratique abandonne la puissance aux ambitieux les plus habiles ou aux fonctions les plus nombreuses. Le libéralisme économique abandonne la puissance aux aventuriers d’affaires et aux financiers bien pourvus ; et les usurpateurs de la puissance économique, et les usurpateurs de la puissance politique échangent les subsides, les services et les protections. Ainsi une société qui devrait avoir pour loi suprême le bien commun de ses membres est soumise à tous les caprices de l’opinion et de la réussite, abandonnée au double hasard de la concurrence et de la compétition. Une société qui devrait avoir pour but de donner la paix aux hommes qui la composent n’est plus qu’un vaste champ de bataille, où les meilleurs ne triomphent presque jamais. Lutte des partis, lutte des classes : le jour viendra où il apparaîtra inconcevable qu’une société ait pu tolérer ces conflits abominables que dis-je ? Les tolérer : en vivre, et les justifier. Or, qu’on le remarque bien : que ces luttes restent indécises, ou que triomphe une des forces en présence, le désordre reste le même. La tyrannie n’est que la conclusion tirée de l’anarchie par les plus nombreux ou par les plus forts – et celle du nombre, et celle de l’argent sont de toutes les plus barbares. L’anarchie et la tyrannie ne sont que les fruits naturels d’une société qui trahit sa mission et laisse ses membres livrés à eux-mêmes. L’état présent de notre pays et du monde vérifie durement les jugements de l’intelligence, et nous rappelle que, politiquement et socialement, l’anarchie et la tyrannie ne font qu’un.
Socialisme => Libéralisme => Anarchie
Les caractéristiques du libéralisme
- L’Optimisme libéral, vision optimiste de l’Humanité : la recherche de l’intérêt particulier va dans le sens de l’intérêt général, le profit dans un univers économique de concurrence bénéficie à l’activiité de tous, la démocratie parlementaire croit que la décision d’une majorité de députés participe au bien commun.
- affirmation des droits individuels, méfiance à l’égard de l’autorité vu comme opposé.
L’erreur libérale
- L’Optimisme libéral (pensée de Rousseau: l’homme nait bon c’est la société qui le corrompt) ne résiste pas à une étude philosophique de l’âme humaine et à une étude empirique.
- “La liberté n’est pas au commencement mais à la fin; elle est le fruit du bonne ordre” Pierre Gaxotte
- La liberté et l’autorité ne s’oppose pas; une autorité est une liberté arrivé à la perfection
L’optimisme libéral de Rousseau
Son raisonnement :
- Liberté et égalité originelle perdues à cause du système politique. Il faut un nouveau contrat social pour retrouver cette liberté et cette égalité. Un peuple libre est un peuple qui la loi il faut donc des représentants. Les hommes deviendront ainsi à la fois sujets et souverrains. Il n’y a aucun danger ont pourra leurs faire confiance et il serait même illogique de leurs désobbéir puisque c’est nous même qui donnons des ordres par leur intermédiaire. (toute puissance de la démocratie libérale)
- Pour se prononcer pour l’intérêt commun il faut renoncer à ses intérêts particuliers: famillials, professionnels, locaux alors que l’égoïsme est naturel. Pour Rousseau afin de protéger l’intérêt général il faut la réduire à la volonté de “purs”. (germes du totalitarisme, de la tyrannie d’un petit groupe de “vertueux”, olligarchie)
Critique Maurrassienne
- Les libertés se limitent les unes les autres dans un état sauvage ou anarchique
- loi du plus fort : les forts exploitent les faibles tant que les faibles ne trouvent pas de moyen pour canarder leurs bourreaux
- voir les conséquences de la loi du plus fort sur l’écologie, le chômage, …
- Victoire du fort sur le faible car la liberté est un pouvoir:
- exemples de formes de pouvoirs:
- la richesse
- l’influence
- force physique ou intellectuelle
- La liberté n’est pas au commencement (p. 123 de Mes Idées Politiques)
- Condorcet : “Plus l’autorité faiblit plus la liberté augmente” mais cela n’est pas si simple. Maurras nous dit : plus on peut plus on est libre et quand on est libre cela veut dire qu’on dispose d’une autorité.
Conclusion
La démocratie parlementaire est basée sur le libéralisme. Le liberalisme proclame que les hommes sont libres et égaux, leurs opinions sont égales. Pour gouverner il faut compter les voix et suivre l’avis de la majorité. C’est la loi du Nombre.
=> L’autorité n’est pas l’ennemie de la liberté au contraire. La loi étant l’expression de la volonté générale, les citoyens s’y plient naturellement pour le bien de tous. La critique de Maurras pulvérise le rêve libéral bisnounours. Les hommes ne naissent pas libre (voir Mes Idées Politiques, l’inégalité protectrice avec l’exemple du petit enfant, complétement tributaire de ses parents). Quand je suis libre de faire quelquechose c’est que je peux le faire. La Liberté avec un grand L c’est l’autorité absolue (régime totalitaire, terreur, nazisme, fascisme). Personne ne la detient surtout à sa naissance. Les hommes ont des libertés, chaque fois qu’ils ont une parcelle de pouvoir. Ceux qui en ont plus que d’autres sont plus libres que d’autres. Les hommes ne sont donc pas égaux. De même une autorité est une liberté. Les deux termes ne sont pas contradictoires. Ils ne s’expliquent que l’un par rapport à l’autre.
Sources
- CHL.TV, Le libéralisme : principes et critiques (entretien avec Alain de Benoist), https://www.youtube.com/watch?v=PyTvbe0-xQk, 2014
- Pierre-Louis Majourane, Douze leçons de politique maurrassienne, Supplément au N°49 de l’Action Française Étudiante, 1979 ?
- Charles Maurras, Mes idées politiques, 1937
- Lysenfleur, Le libéralisme contre la droite, Le Rouge & Le Noir, https://www.lerougeetlenoir.org/opinions/les-opinantes/le-liberalisme-contre-la-droite, 2015
- L’illusion libérale, conférence d’Alain de Benoist, https://www.lerougeetlenoir.org/contemplation/les-contemplatives/l-illusion-liberale-par-alain-de-benoist